Plus qu'un jeu de hasard, la roulette est le symbole même du casino. Passant au travers des âges sans perdre une ride, elle nous défie depuis plus de deux siècles. Fabriquant du hasard comme d'autres machines fabriquent des outils ou des conserves, elle tourne, tourne dans une totale indifférence à la rencontre de cette malicieuse petite bille d'ivoire porteuse de tous nos espoirs. L'appareil est d'une grande simplicité et pourtant les voies du hasard qu'il génère demeurent difficilement pénétrables. Partant d'un même dispositif (le cylindre et la boule), la roulette nous propose toute une panoplie de manières d'aller à la rencontre de l'aléatoire. Pleins, chevaux, transversales, carrés, rouge, noir, etc..., sont autant d'opportunités laissées aux joueurs en quête de fortune. Ici, pas de favoris, pas d'outsiders. Chaque chance proposée sur le tapis a sa cote et la cote est la même pour tous les joueurs. Amateurs de gros rapports, les chevaux et les pleins vous permettront de multiplier votre mise par 17 ou 35. Joueurs prudents, les colonnes, les douzaines et les chances simples vous permettront de mettre un grand nombre de numéros de votre côté. En fait, tout joueur, novice ou chevronné, trouvera toujours une possibilité de jeu qui lui convient à la roulette. Tant du point de vue tempérament que du point de vue financier. Voilà pourquoi la roulette est appelée Reine des Casinos et que beaucoup d'eau coulera encore sous les ponts avant qu'elle ne perde ce titre...
La roulette est peut-être toujours la reine incontestée des salles de casinos, mais elle a subi depuis sa naissance les assauts de centaines de mathématiciens, de chercheurs, de calculateurs, de systémiers, plus tard d'informaticiens et de logiciens. Elle reste difficile à battre mais elle recule, cède du terrain. Si un certain nombre de méthodes, longuement élaborées ont fait naître de grands espoirs chez leurs auteurs... avant de s'avérer négatives, d'autres ont rapporté à leurs inventeurs gloire et fortune (Garcia, Wells, Winkel, Jarecky, Sadia, Marigny de Grilleau entre autres). Cependant sachez-le et pensez-y, l'étude et l'essai de nombreuses méthodes nous permettent d'affirmer que si la roulette est invaincue, elle n'est certainement pas invincible!
On attribue parfois à Blaise Pascal l'invention de la roulette. Cette idée est fausse mais excusable, puisque d'une part, Pascal compte parmi les créateurs du calcul des probabilités et que d'autre part, il a écrit deux ouvrages sur la roulette! Or il entendait par là, non pas le jeu de la roulette mais une courbe géométrique, appelée depuis cycloïde, et dont on se fait une idée en songeant à la trajectoire décrite par le bouchon de la valve d'une bicyclette, pendant le mouvement de celle-ci.
Dans l'antiquité gréco-romaine, il existait déjà des jeux qui mimaient les courses de char au moyen de billes colorées roulant dans un espace clos. La première édition de l'encyclopédie de Diderot donne une description de la roulette mais sans nommer l'inventeur de ce jeu.
C'est en 1760 que le jeu de la roulette est officiellement introduit à Paris par Sartines, lieutenant de police pour moraliser les jeux de hasard. Comme l'écrit Eaon Cesar Corti dans le Magicien de Monaco (Stock 1933), la roulette présente le grand avantage d'exclure toute intervention arbitraire dans la marche du jeu. La bille d'ivoire choisit des voies imprévisibles et plus d'un obstacle la détourne de son chemin avant qu'elle ne vienne se loger dans une des 38 cases numérotées (36 numéros plus 2 zéros). La roulette à un seul zéro fut inventée et lancée en 1841 par les frères François et Louis Blanc, alors propriétaires du casino de Bad Homburg en Allemagne. Depuis cette date, le cylindre, le tapis et les règles du jeu de la roulette n'ont plus changé. Tout au plus a-t-on imaginé quelques variantes.
Il existe 3 types de roulette:
La roulette est formée d'un cylindre en bois dont le fond est constitué par un disque de métal tournant sur un axe. La partie supérieure du plateau est divisée en 37 cases séparées par de petites cloisons en cuivre (chacune de ces cases comporte un numéro de 0 à 36). Pour imprimer à ce cylindre un mouvement de rotation, il suffit de pousser (dans un sens ou dans l'autre) une des quatre boules du croisillon central. Donc le croupier, à l'aide de 2 branches en cuivre en forme de croix placées au centre du cylindre imprime à celui-ci un mouvement de rotation. Immédiatement après, il lance dans une galerie située au-dessus de la plaque mobile, et dans le sens contraire au mouvement de la roulette, une bille naguère en ivoire, aujourd'hui en matière synthétique. A cet instant, le croupier prononce 2 fois les paroles traditionnelles : "Messieurs, faites vos jeux" (une fois pour engager la partie, une autre fois pour stimuler les joueurs au moment de lancer la bille). Cette invitation que lance le croupier est une invention de François Blanc, le père de la roulette française à un zéro. Devenue sacrosainte, personne ne s'aviserait de la modifier même lorsqu'il n'y a que des femmes autour de la table de jeu.
Il est vrai qu'au début les femmes n'étaient pas admises dans les salons de jeux. On s'aperçut bien vite que leur présence était indispensable, pour deux raisons majeures : les femmes exaltent les joueurs et elles sont encore plus acharnées que les hommes.
Cette parenthèse faite, revenons à notre bille qui, animée d'une vitesse suffisante, est pressée contre la paroi de la piste par la force centrifuge. La rotation du cylindre est pratiquement uniforme pendant tout le mouvement de la bille (car les frottements sont très faibles, et la masse du cylindre assez considérable). Au contraire, le frottement freine bientôt la bille : la force centrifuge ne surmonte plus la pesanteur, la bille a un mouvement en spirale et heurte des obstacles; (à ce moment-là vous entendez le sinistre "rien ne va plus" et dès cet instant plus personne n'est autorisé à miser); elle tombe ensuite le long de la piste et du cercle des numéros, remonte éventuellement sur la cloche et, après plusieurs oscillations, se place dans l'une des 37 cases. Dés que la bille est logée dans une case, le croupier freine le cylindre afin que chacun puisse vérifier le numéro gagnant et proclame le résultat en déclinant le numéro sorti ainsi que toutes les chances simples auquel il appartient. Par exemple : "le 27, Rouge, Impair et Passe". Ensuite il est procédé au ratissage des mises perdantes et au paiement des gains. Dans le cas où la bille est lancée de façon irrégulière, sort du cylindre, ou si un jeton tombe dans ce dernier, le croupier annonce "rien ne va"; puis il reprend le processus à son début.
Comme vous pouvez le constater, les conditions requises pour "fabriquer du hasard" sont pleinement satisfaites: symétrie et réglage de l'appareil, mélange des numéros, double mouvement en sens inverse, obstacles, descentes et remontées, zigzags, rebondissements. Tout cela est trop complexe pour être prévu ou efficacement dirigé. Tout joueur, qui conserverait quelque inquiétude à ce sujet, n'aurait qu'à lacher la bille du haut de la piste, devant un numéro du cylindre immobile: non seulement, on attrape pour ainsi dire jamais le numéro visé, mais on n'a même pas une chance sur deux d'atteindre un de ses quatre voisins de droite ou un de ses quatre voisins de gauche. Admettons, pour préciser un peu plus, que le numéro visé (cylindre immobile; bille lachée sans vitesse, bien en face, entre deux obstacles) soit le zéro. Dans ces conditions on a sensiblement neuf chances sur dix d'atteindre un des voisins du zéro, c'est-à-dire un des dix-sept numéros (entre le 22 et le 25), qui se trouvent dans la portion nord du cylindre.
C'est une belle galéjade que de croire qu'en fonctionnement normal (cylindre tournant, bille lancée avec la vitesse habituelle), un croupier adroit pourrait faire tomber la bille dans la région du cylindre qu'il désirerait!
A l'exception du zéro, tout numéro de la roulette possède 3 caractéristiques:
Comment les numéros sont-ils disposés sur le cylindre?
L'ordre des numéros dans le cylindre, à la différence de celui du tableau, n'est pas croissant. En fait leur disposition obéit à une répartition parfaitement équilibrée qui a fait l'objet de savants calculs avant que ce résultat soit obtenu. Si on divise le cylindre de la roulette en deux parties égales de chaque côté d'un axe vertical qui passerait par le zéro, et aboutirait entre le 5 et le 10, on obtient une répartition égale de toutes les chances, d'un côté comme de l'autre. Il y a autant de numéros appartenant à chacun des sixains, à chaque douzaine, à chaque colonne et à chacune des chances simples. On constate qu'excepté les transversales où il n'y a pas vraiment irrégularité, mais plutôt complémentarité, l'équilibre parfait entre ces deux moitié de cylindre est réalisé. Par conséquent, le zéro qui n'appartient à aucune chance simple, à aucune douzaine ou colonne, à aucune transversale ni à aucun sixain, est situé au point exact où l'équilibre de toutes les chances se fait. Si l'on veut considérer les transversales du zéro (0,1,2) et (0,2,3), on s'aperçoit que là aussi on les trouve chacune une fois dans chacune des parties du cylindre.
Cette disposition a-t-elle une importance? Non dans la mesure où, mécaniquement, la roulette est bien conçue et même une répartition en moitié rouge et moitié noir ne changerait rien au caractère aléatoire de la roulette idéale. Toutefois, si quelques défauts minimes d'équilibrage ou de rugosité favoriseraient une portion du cylindre, cette disposition en atténuerait les effets.
Sur le tableau placé horizontalement et communément appelé Tapis Vert, on retrouve tous les numéros du cylindre. Cependant, il sont disposés, cette fois, dans un ordre croissant et sur trois colonnes, de chaque côté desquelles se trouve la "bande", c'est-à-dire les trois chances simples: rouge, impair et manque, face à leur opposé: noir, pair et passe.
Au bas du tableau, sous la bande, on trouve les douzaines: douze premiers (1ère douzaine: numéros de 1 à 12), douze milieux (2ème douzaine: numéros de 13 à 24), douze derniers (3ème douzaine: numéros de 25 à 36) et sous les numéros, on trouve les colonnes: colonne 1 (les 12 numéros de la première colonne), colonne 2 (les douze numéros de la colonne centrale), colonne 3 (les douze numéros de la troisième colonne). Les deux chances seront appelées les chances doubles (Douzaines et Colonnes).
Le tableau des mises permet de jouer pour n'importe lequel des 37 numéros avec diverses possibilités d'application. Nous allons les passer en revue:
Quelles que soient les chances jouées, le joueur a toujours la faculté de placer lui-même sa ou ses mises sur le tapis ou bien de confier ses jetons à l'un des croupiers pour qu'il le fasse à sa place. Cette dernière façon de procéder est fortement conseillée aux joueurs misant un grand nombre de pièces sur les chances différentes car, ce faisant, ils se protègent contre toute contestation (il rentre dans les attributions de chaque croupier de se souvenir très précisément des enjeux qui lui ont été confiés). Les "annonces" rentrent précisément dans le cadre des enjeux qui sont presque systématiquement confiés aux croupiers. On peut les classer en deux catégories:
D'après la réglementation française, il n'y en aurait que trois: les "Voisins du Zéro", le "Tiers du Cylindre" et les "Orphelins" ou "Isolés". Ces groupes ont l'avantage de proposer des numéros se touchant dans le cylindre, mais aussi correspondant sur le tableau à un jeu cohérent, possible avec des pleins, des chevaux, voire quelques transversales. A ces trois annonces classiques en France, nous en avons ajouté une quatrième très prisée des joueurs belges , hollandais et allemands: le "Jeu du Zéro".
Toute table de roulette fixe une unité de mise, c'est-à-dire la somme la plus faible que l'on peut parier, tant sur les chances multiples que sur les chances simples. Par ailleurs, les maisons de jeux ont l'habitude d'établir un maximum pour chacune des chances. En général, le maximum des mises est fixé à:
Les paiements aux joueurs gagnants et l'encaissement des masses perdues doivent être effectués par les croupiers du centre. Ils enlèvent les enjeux perdus par les joueurs avant de payer les mises gagnantes. Selon la réglementation française, les paiements doivent obligatoirement être effectués dans l'ordre suivant: colonnes, douzaines, chances simples, transversales, carrés, chevaux et en dernier lieu les pleins.
Le Zéro n'appartient à aucune des chances simples. Sa sortie entraîne obligatoirement la perte de toutes les mises sauf les siennes et celles des chances simples qui vont pour ces dernières, "en prison".
Pour signaler qu'une mise est en prison, elle est placée sur le trait à l'intérieur de la chance simple.
Le joueur a, dans ce cas, la possibilité, soit de laisser sa mise enfermée jusqu'au coup suivant, soit de partager avec la banque, à condition toutefois que son montant soit égal à deux fois le minimum autorisé à la table. Il est également permis de faire passer cette mise (toujours enfermée) sur la chance simple opposée. Au coup suivant, en cas de gain de la chance simple de cette mise, celle-ci est simplement libérée. Dans le cas contraire, elee est acquise définitivement à la banque. Il peut aussi arriver que le zéro sorte une deuxième fois de suite. Il faudra alors deux sorties également consécutives de la chance jouée pour obtenir la libération de l'enjeu. Bien que le fait soit extrêmement rare, il est à noter que si le zéro se répète trois fois de suite, toutes les mises des chances simples sont définitivement perdues.
Le personnel affecté à chaque table de roulette comprend:
Le chef de table et le sous-chef de table surveillent la partie et sont responsables de la clarté et de la régularité du jeu, des opérations de change à la table, ils sont chargés de surveiller que les mises soient correctement disposées sur le tapis. Ils doivent se placer vis-à-vis et en face du cylindre. Les croupiers se placent au centre de la table et les "bouts de table", comme leur nom l'indique, s'installent aux extrémités.
Tous les croupiers affectés à la roulette doivent être chargés successivement du lancement de la bille sans qu'aucun d'eux puisse se spécialiser dans l'emploi. En général, ils changent toutes les demi-heures environ.
La convention veu que lorsque l'on touche un numéro en plein, on laisse l'équivalent de sa mise "pour les employés". En dehors du gain en plein, vous êtes libre de donner ou non un pourboire aux croupiers. Si le personnel est sympa, n'hésitez pas à laisser de temps en temps une pièce aux employés même si vous ne jouez pas de pleins.
Source: Initiation à la roulette, EGRA-News no 6 - décembre 1990